TISANE: L’art de la formulation et de la préparation
Publié par Laurent Jacquemin le
Herboristerie pratique: L'art de la formulation et de la préparation de la Tisane
La Tisane est le meilleur moyen de drainer l’organisme et de profiter des bienfaits de plantes au quotidien. Du fait de leur teneur élevée en principes actifs diversifiés, les plantes médicinales recèlent plus d’une corde à leur arc et agissent souvent sur plusieurs problèmes de santé (c’est ce qu’on appelle le “Totum” de la plante). Il suffit d’en avoir quelques unes sous la main pour couvrir les besoins principaux de votre pharmacie familiale.
Cet article va vous faire découvrir quelques plantes médicinales locales qui vous permettront de pallier aux maux du quotidien pour toute la famille.
1 – Utiliser des plantes sèches ou fraîches de qualité
Il faut savoir que les plantes sont séchées pour être conservées et disponibles toute l’année pour les besoins de l’herboristerie. Mais sachez que vous pouvez utiliser les plantes fraîches de votre jardin pour préparer votre tisane (dans ce cas on en met deux fois plus car elles sont gorgées d’eau).
Pour les plantes que vous allez acheter en magasin ou chez votre paysan-herboriste en direct, le nom de la plante doit être écrit en français et en latin, ce qui assure une identification précise (ex: Camomille romaine, Chamaemelum nobile). En magasin, regardez bien la provenance des plantes pour savoir si elles viennent d’un autre pays ou si elles ont poussé non loin de chez vous, car les plantes de votre terroir sont celles qui vous correspondent le mieux et sont plus adaptées à vos besoins.
De nos jours, nous importons plus de 80% de plantes sèches que nous consommons en France, ce qui fait que la plupart des plantes vendues en magasin viennent en général des pays d’Europe de l’est ou du nord de l’Afrique. Ces flores sont trop éloignées de nous pour nous correspondre totalement et bien souvent, cela fait déjà plus de deux ans qu’elles ont été récoltées. Chez votre paysan-herboriste, vous aurez généralement la garantie d’avoir des plantes de l’année, ou de deux ans maximum (déontologie du paysan-herboriste français). Elles vous correspondent davantage et contiennent plus de principes actifs, les constituants de la plante.
Enfin, choisissez des plantes cultivées en agriculture biologique (certifiées AB au minimum) afin d’éviter de consommer des pesticides et résidus de produits phytosanitaires utilisés dans des modèles agricoles à échelle industrielle. D’un point de vue qualitatif, assurez vous que la plante ait conservé toutes ses qualités organoleptiques (couleur, odeur et saveur).
2 – Avant toute utilisation, identification de la drogue sèche ou de la plante fraîche
Que vous prépariez votre tisane avec des plantes sèches ou fraîches, dans tous les cas vous devez impérativement vous assurer de la bonne identification botanique de la plante, car toutes les plantes contiennent des substances actives, plus ou moins toxiques. Comme le disait Paracelse, “Tout est poison, rien n’est poison, c’est la dose qui fait le poison”.
Pour identifier avec certitude vos espèces botaniques, vous pouvez vous munir d’une flore (cf. exemple du Guide Delachaux dans la bibliographie ci-dessous) et ainsi déterminer à quelle spécimen vous avez à faire, par l’observation de certains critères (racines, feuilles mais surtout fleurs).
Lorsque vous installez des plantes au jardin, choisissez des plants et semences de pépiniéristes et semenciers locaux certifiés AB, pour partir d’une bonne génétique, sans pesticides ni OGM.
Si vous faites de la cueillette sauvage, éviter tout risque de confusion en vous munissant de votre flore et en vous assurant de la bonne identification. Nous prenons bien souvent en exemple la cueillette d’Ail des ours au début du printemps, plante détoxifiante des métaux lourds tapissant les forêts. Sa feuille ressemble à la feuille du Muguet sauvage, plante toxique à ne pas ingérer. La cueillette sauvage n’est pas anodine, soyez certains de votre identification avant de cueillir. Si vous avez le moindre doute, ne cueillez surtout pas.
Pour la cueillette sauvage, éviter de cueillir dans des zones polluées telles que les bords de routes, de rivières, de champs en agriculture conventionnelle et surtout soyez respectueux du site. Ne cueillez que 1/10ème de la plante pour préserver la ressource et ne pas accélérer la disparition de l’espèce dans son biotope naturel. N’oublions pas que la biodiversité est en danger et qu’il faut la préserver par tous les moyens!
3 – Séchage des plantes pour une utilisation toute l’année
Pour le séchage des plantes que vous cueillez au jardin ou en sauvage, une fois récoltées et non lavées (sauf les racines qui doivent être brossées pour enlever toute la terre), disposez les sur un linge propre, espèce par espèce pour ne pas les mélanger si vous en avez plusieurs, bien étalées, ne se chevauchant pas trop, sur des claies ou des cagettes en bois.
Mettez les dans une pièce totalement obscure et bien ventilée, puis empiler les cagettes si besoin. Etant donné que l’humidité s’échappe vers le haut, mettez toujours les plantes les plus fraîches en dessous de celles ayant déjà un peu séché.
Quand les plantes sont bien sèches, c’est-à-dire quand elles s’effritent complètement sans difficultés, que les petites tiges (pédoncules) sont cassantes, stockez les dans des sacs kraft ou bocaux en verre, bien fermés hermétiquement.
L’important est d’avoir des plantes qui sèchent le plus rapidement possible afin qu’elles conservent un maximum de principes actifs (les constituants de la plante) et toutes leurs qualités organoleptiques (couleur, odeur, saveur, etc.). Il est aussi tout à fait possible de sécher vos plantes dans un déshydrateur, même si ce n’est pas idéal, elles perdront simplement plus rapidement leurs couleurs.
Qu’elles soient stockées en bocal ou en sac kraft, pensez à bien identifier vos contenants, avec le nom français, le nom latin, la date de récolte et le site de cueillette. Les parties fragiles (feuilles, fleurs) se conservent 1 an, alors que les parties plus coriaces (racines et graines) se conservent 2 ans.
4 – L’art de la formulation: Savoir associer les plantes
L’art de formuler une synergie de plante pour préparer une bonne tisane réside en le fait de trouver une réponse qui soit à la fois adaptée à une problématique thérapeutique (s’il y a en une) et qui soit savoureuse (pour le plaisir du palais). Pour ce qui est du goût, le secret est de réussir à équilibré les saveurs des plantes amères en utilisant d’autres notes aromatiques: les plantes au goût citronné, anisé; mentholé, sucré, méditerranéen, etc.
Généralement on utilise trois plantes en synergie, en fonction de leurs propriétés, mais il est possible d’en mettre plus ou moins. Sur ces trois plantes, mettez deux plantes qui agissent sur la même sphère (digestives, calmantes du système nerveux, respiratoires, endocriniennes, etc.) et une plante qui équilibre le goût.
Pour le plaisir des yeux vous pouvez aussi ajouter de la couleur avec les fleurs, vous bénéficierez ainsi de leur pouvoir antioxydant puissant, conféré par leurs pigments végétaux: les jaunes et oranges indiquent une teneur élevée en caroténoïdes et flavonoïdes, les bleus et violets indiquent la présence d’anthocyanes, etc. Comprenez bien que les couleurs sont aussi importantes dans l’assiette que dans la tasse!
Au départ, acceptez le fait de tâtonner pour réaliser vos synergies: une pincée de lecture sur les propriétés et indications des plantes, une louche d’intuition et de ressentis, et bientôt une bonne cuillère d’expérience! Au final, faites vous confiance et vous deviendrez de plus en plus autonome dans la prévention naturelle du maintien de votre santé.
5 – Préparation de la Tisane ou de la Décotion
Pour préparer et déguster une tisane, mettez les plantes fraîches ou sèches dans une casserole d’eau froide et couvrez avec un couvercle. Froisser les plantes avant de les mettre dans l’eau pour favoriser les échanges et l’extraction des principes actifs dans l’eau. Si vous mettez des parties dures (racines ou graines), pilez les au mortier au préalable et faites une décoction.
Chauffez jusqu’à frémissement et, pour la tisane, couper avant ébullition; pour la décoction, laisser bouillir (à petit bouillon) pendant 10 à 20 minutes (comme par exemple les racines de Bardane ou de Pissenlit).
Pour la tisane ou la décoction, laisser ensuite infuser à couvert pendant 10 à 15 minutes, puis filtrer dans une thermos pour pouvoir en bénéficier tout au long de la journée.
A la dégustation, soyez conscient et présent, ouvrez tous vos sens et profitez des bienfaits des plantes en préventif ou en curatif. La tisane est effectivement le meilleur moyen de drainer l’organisme, mais aussi de le soutenir et de le maintenir en santé. ou de
6 – Exemples de synergies de plantes pour les maux du quotidien
Digestive
Angélique
Menthe verte
Camomille romaine
Antiseptique
Calendula
Sarriette
Thym de Crête
Femmes
Achillée millefeuille
Calendula
Sauge
Articulaire
Cassis
Frêne
Bleuet
Détente
Angélique
Mélisse
Camomille romaine
Sommeil
Mélisse
Pavot de Californie
Angélique
Elimination
Frêne
Pissenlit
Laurier noble
Toux d’hiver
Guimauve
Thym de Crête
Rose
Maux de ventre
Calendula
Rose
Sarriette
Lotion pour la peau
Bardane
Calendula
Mauve
Energie du matin
Origan
Ortie
Romarin
Hépatique
Chrysanthème
Pissenlit
Romarin
BIBLIOGRAPHIE
“Secrets et vertus des plantes médicinales“, Sélection du Reader’s Digest, 1985.
“L’herboristerie, manuel pratique de la santé par les plantes: phytothérapie, aromathérapie, oligothérapie, vitaminothérapie“, Patrice de Bonneval, Ed. Désiris, 2006.
“Traité pratique de phytothérapie“, Dr Jean-Michel Morel, Ed. Grancher, 2008.
“Manuel d’herboristerie et de pharmacopée chinoise: plantes chinoises, plantes occidentales“, Dr G. Guillaume et Dr Mach-Chieu, Editions Désiris, 2009.
“Guide des contre-indications des principales plantes médicinales“, Michel Dubray, Ed. Lucien Souny, 2010.
“Guide Delachaux des fleurs de France et d’Europe“, David Streeter, Ed. Delachaux et Niestlé, 2011.
“Larousse des plantes médicinales: identification, préparation, soins“, Larousse, 2013.
“Secrets des plantes pour se soigner naturellement”, Michel Pierre et Michel Lis“, Artemis éditions, 2014.
“Les 250 réponses de l’herboriste Marie-Antoinette mulot: tous les petits maux quotidiens soignés par les plantes les plus courantes“, 7ème éditions, Ed. Dauphin, 2016.
“250 remèdes naturels à faire soi-même“, Dr Claudine Luu, Ed. Terre vivante, Conseils d’experts, 2016.
“55 plantes médicinales dans mon jardin; les cultiver, les récolter, les conserver“, Virginie Peytavi, Ed. Terre vivante, 2016.
“L’herbier secret du Druide: des plantes pour les hommes et les esprits“, Pascal lamour, docteur en pharmacie, Ed. Ouest-France, 2017.
“Les arbres sacrés des Druides“, Florence Laporte, Rustica éditions, 2018.
“Le chemin des herbes: du Midi à l’Atlantique, identifier et utiliser 80 plantes sauvages médicinales, alimentaires, tinctoriales“, Thierry Thévenin, Cédric Perraudeau, Jacky Jousson, Ed. Ulmer, 2019.
“Traité d’herboristerie énergétique, puissance et sagesses des plantes“, Matthew Wood et Laure Rose, Guy Trédaniel éditeur, 2022.